Rapport « Résidus de pétrole dans les pesticides : un problème de santé publique ? »

Cette revue de littérature a pour objet de donner une vision globale d’un problème mis en évidence dans le cadre de la campagne Secrets Toxiques : la présence potentiellement systématique de composés toxiques non déclarés dans des pesticides présents sur le marché européen au moment des analyses.

Ces composés sont plusieurs métaux lourds dont le plomb et l’arsenic, ainsi que seize hydrocarbures aromatiques polycycliques, composés issus du pétrole connu pour leur toxicité sur le vivant.

Depuis la sortie de l’étude qui a initié la démarche Secrets Toxiques (Seralini & Jungers, 2020), et détecté des concentrations faibles mais significatives de ces composés, de nombreuses questions ont été posées, mais peu de réponses ont été apportées.

Au cours d’échanges entre eurodéputés, ONG, et l’EFSA, cette dernière a admis en 2021 que la présence de ces composés n’avait pas été déclarée par les fabricants des pesticides analysés. Néanmoins, ses représentants se sont montrés peu inquiets, qualifiant les niveaux de concentration retrouvés qu’ils qualifient de « traces » ou « d’impuretés ».

Par ailleurs, l’Agence Nationale de Sécurité Alimentaire (ANSES) française a également admis l’absence de ces composés dans les déclarations des fabricants, et a indiqué au printemps 2021 avoir demandé à ces derniers des explications. Elle a par ailleurs indiqué en novembre 2021 avoir procédé à une contre-expertise répliquant les analyses de l’étude Seralini-Jungers (2020) qui avait alors conclu à l’absence de composés dangereux.

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Malgré des demandes répétées, il aura fallu que le parlementaire français Loïc Prud’homme saisisse la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) pour obtenir une copie caviardée de cette contre-expertise en juin 2022. Il y aura alors été détecté de graves erreurs scientifiques. Les noms des produits étaient caviardés, rendant impossible toute comparaison tierce avec l’étude Seralini-Jungers (2020). Les méthodologies de détection des HAP n’étaient pas précisés, et les métaux analysés n’étaient pas les mêmes. Enfin, et surtout, les seuils de détection des HAP étaient jusque 25 fois supérieurs à ceux de l’étude initiale, aboutissant à des seuils de détection au-dessus des résultats initiaux. Dans ces conditions, la « contre-expertise » ne pouvait que conclure à l’absence des composés détectés.

La grossièreté de ces erreurs a particulièrement choqué notre équipe, qui a immédiatement publié un communiqué de presse1. Mais au final, deux ans après la publication de l’étude initiale, aucune action significative n’a été engagée pour expliquer, approfondir ou résoudre le problème posé par l’étude initiale.

Les auteurs de cette dernière affirment pourtant que la présence des composés toxiques dans les produits analysés est très problématique, du fait de leur non-déclaration d’un point de vue légal, et du fait du rôle de catalyseur de toxicité que ces composés ont même à de faibles concentrations, d’un point de vue scientifique. A défaut de meilleur indicateur, ils comparent les valeurs de concentration retrouvées aux niveaux tolérés dans l’eau potable, et constatent qu’elles peuvent être jusqu’à plusieurs milliers de fois supérieures à ces dernières. Si un pesticide n’a pas vocation à être bu, cette présence à des concentrations aussi importantes interroge, d’autant plus si les composés en question n’ont pas été déclarés.

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